S’agit-il d’un trou noir ou d’un nouveau type d’étoile ?

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Dans la relativité générale, les trous noirs sont faciles à définir. Ce sont des objets avec un horizon d’événements. Cet horizon est comme une ligne dans le sable, où tout ce qui le traverse est à jamais piégé dans le trou noir. La théorie quantique pourrait permettre à l’énergie de s’échapper par le rayonnement de Hawking, mais les trous noirs classiques sont un voyage à sens unique.

D’un point de vue observationnel, les trous noirs sont un peu moins définis. Nous avons observé des objets si denses qu’ils ne peuvent pas être de la matière régulière, et nous avons capturé l’ombre de trous noirs supermassifs à la fois dans notre propre galaxie et dans M87. Grâce aux observatoires d’ondes gravitationnelles, nous avons vu la fusion de trous noirs denses et les ondes gravitationnelles qu’ils émettent correspondre à la relativité générale aux limites de l’observation. Nous savons donc que les trous noirs existent. Mais cela signifie-t-il que tout ce que nous voyons qui ressemble à un trou noir est en fait un trou noir ? Pas nécessairement.

Même si les preuves d’observation des trous noirs sont très solides, il peut être utile de regarder d’autres objets qui pourraient avoir une apparence similaire. Ces objets inhabituels n’existent peut-être pas, mais c’est un bon moyen de s’assurer que nous ne devenons pas trop confiants dans nos modèles scientifiques. C’est pourquoi une équipe s’est penchée sur les propriétés astronomiques des solitons topologiques.

Un soliton est un effet d’onde qui s’auto-renforce. Ils ont d’abord été observés comme une montée d’eau circulant dans un canal. Contrairement aux vagues régulières, elles conservent leur forme pendant de longues périodes, presque comme si elles étaient un objet. Les solitons d’onde d’eau ont été étudiés en laboratoire depuis la fin des années 1800, et les solitons optiques ont été créés pour la première fois dans les fibres de verre dans les années 1980. C’est un phénomène physique bien connu. Un soliton topologique est une description mathématique de cet effet.

Pour ce travail, l’équipe a examiné comment les solitons topologiques dans la relativité générale lentilleraient gravitationnellement la lumière et l’ont comparée à la façon dont les trous noirs lentillent la lumière. Ils ont trouvé que les deux étaient remarquablement similaires. Tellement similaires qu’il serait difficile pour les astronomes de les distinguer. En principe, si nous observons que la lumière des étoiles est fortement cristallisée par un objet, il pourrait s’agir d’un trou noir ou d’un soliton.

Vue 3D de l’évolution spatio-temporelle d’un soliton Peregrine. Crédit : Utilisateur de Wikipédia Christophe.Finot

Les travaux montrent qu’un objet soliton ressemblerait à un trou noir pour les astronomes, mais n’aurait pas d’horizon des événements. Si deux solitons devaient fusionner, les ondes gravitationnelles qu’ils produisaient seraient également similaires à celles des trous noirs. C’est un résultat intéressant, mais qui ne réfute pas encore les trous noirs. L’équipe n’a pas expliqué comment ces étranges solitons se formeraient. Tout ce que nous savons sur les étoiles nous dit que les grandes étoiles s’effondreraient dans un trou noir, pas un soliton.

Mais il existe des options intéressantes quoique très improbables pour les solitons. Les solitons apparaissent comme des solutions dans la théorie quantique, comme les condensats de Bose-Einstein, alors peut-être qu’une étoile étrange composée de bosons pourrait finir sa vie en tant que soliton. Ces étoiles à bosons hypothétiques ou étoiles Proca, comme on les appelle parfois, sont les bosons frères des étoiles à fermions telles que les étoiles à neutrons ou les étoiles à quarks. La matière bosonique connue ne pourrait pas devenir une étoile Proca, mais si la matière noire est composée de bosons, une partie de celle-ci pourrait former une étoile Proca.

Tout cela est très spéculatif. Mais c’est une idée amusante à penser. D’après tout ce que nous savons, certains de ces trous noirs de masse stellaire que nous observons dans notre galaxie pourraient être d’étranges étoiles boson déguisées.

Référence: Heidmann, Pierre, Ibrahima Bah et Emanuele Berti. “Imaging Topological Solitons: la microstructure derrière l’ombre.” Examen physique D 107.8 (2023): 084042

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