Ce qui se passe sous le niveau cellulaire lorsque le cœur se contracte et se relâche a longtemps été inexploré. Grâce à de nouvelles techniques de microscopie électronique à ultra-haute résolution, les scientifiques peuvent désormais observer les battements du cœur – presque au niveau moléculaire. Des chercheurs de la faculté de médecine de l’université de Fribourg résument les principaux développements en matière de microscopie électronique cardiaque et leur importance pour la recherche dans une récente publication, parue dans Nature Reviews Cardiology. La connaissance de l’échelle nanométrique est d’une grande importance pour le développement de nouvelles thérapies, par exemple pour les crises cardiaques ou les arythmies cardiaques.
“Grâce aux techniques de microscopie à haute résolution mises au point par nous et par d’autres dans le monde, nous obtenons des informations fascinantes sur l’ultrastructure dynamique du cœur”, explique l’auteur principal de l’étude, le Dr Eva Rog-Zielinska. Elle dirige la section d’imagerie 4D de l’Institut de médecine cardiovasculaire expérimentale (IEKM) du Centre cardiaque universitaire du Centre médical universitaire de Fribourg. “Nous pouvons utiliser cet aperçu pour analyser la structure tridimensionnelle des cellules cardiaques avec une précision sans précédent. Nos images sont constituées de cubes – appelés voxels – dont la longueur des arêtes est inférieure ou égale à un nanomètre. À titre d’illustration, un nanomètre correspond à la distance parcourue par un ongle en une seconde”, explique Mme Rog-Zielinska.
Observer les battements du cœur au super ralenti
Le défi consiste à associer la cartographie à ultra-haute résolution du cœur à une cible en mouvement. “Grâce aux récents progrès de l’imagerie, nous comprenons désormais beaucoup mieux le comportement des cellules musculaires et du tissu conjonctif dans le cœur qui bat”, explique le professeur Peter Kohl, directeur de l’IEKM et porte-parole du centre de recherche allemand 1425, qui se consacre à l’étude de la cicatrisation cardiaque.
La microscopie électronique elle-même, mais surtout les méthodes récemment développées pour la préparation et le post-traitement des échantillons correspondants, jouent un rôle central dans la production de connaissances moléculaires. “Il est particulièrement intéressant de pouvoir enregistrer les cellules musculaires comme des images individuelles dans un film, grâce à une congélation à haute pression précise à la milliseconde. Cela nous permet d’observer les structures moléculaires du cœur en train de battre au super ralenti, pour ainsi dire”, explique M. Kohl.
Expériences, simulations et intelligence artificielle s’entremêlent
Les images microscopiques sont évaluées à l’IEKM à l’aide d’une intelligence artificielle, assistée par des simulations informatiques afin de décrire la fonction cardiaque et les changements pathologiques de manière aussi réaliste que possible. “Les connaissances nouvellement acquises nous permettent d’acquérir une toute nouvelle compréhension de l’activité cardiaque et, sur cette base, de développer de nouveaux concepts thérapeutiques. Nous nous attendons à une période très excitante pour la recherche cardiaque”, déclare M. Kohl.
Référence : “Electron microscopy of cardiac 3D nanodynamics : form, function, future” par Peter Kohl, Joachim Greiner et Eva A. Rog-Zielinska, 8 avril 2022, Nature Reviews Cardiology.
DOI: 10.1038/s41569-022-00677-x