Les lentilles plates minces pourraient déclencher une révolution dans les télescopes spatiaux

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Grâce aux lois de la physique, il existe deux règles de base concernant les télescopes. La première est que plus votre objectif principal ou votre miroir est grand, plus la résolution de votre télescope est élevée. La seconde est que les lentilles et les miroirs doivent être courbés pour focaliser la lumière dans une image. Donc, si vous voulez un télescope spatial suffisamment sensible pour voir les atmosphères d’exoplanètes lointaines, votre télescope aura besoin d’un grand miroir ou d’une lentille incurvée. Mais aucune de ces choses n’est techniquement vraie, comme le démontre une nouvelle conception de télescope proposée.

Les exigences pour les télescopes à haute résolution sont réelles, mais il existe des moyens de les contourner un peu. Par exemple, les télescopes optiques modernes utilisent de grands miroirs, qui sont difficiles à fabriquer dans de très grandes tailles. C’est pourquoi les nouveaux observatoires utilisent une combinaison plus petite de miroirs hexagonaux au lieu d’un seul grand. Même le télescope spatial James Webb utilise plusieurs miroirs en tandem. Avec les télescopes optiques, les miroirs sont tous regroupés, mais ce n’est pas obligatoire.

La taille nécessaire de votre miroir dépend des longueurs d’onde de la lumière que vous utilisez. Les longueurs d’onde de la lumière optique sont de l’ordre de quelques centaines de nanomètres, donc même un miroir de 4 mètres de large vous donne une vue très détaillée du ciel. Les longueurs d’onde radio sont beaucoup plus grandes, de l’ordre de quelques millimètres à plusieurs mètres, et un miroir radio devrait avoir une largeur de plusieurs kilomètres pour créer une image haute résolution. Ainsi, les radiotélescopes modernes tels que l’Atacama Large Millimeter Array (ALMA) utilisent un réseau d’antennes paraboliques. En combinant les données via un processus appelé corrélation, un réseau peut fonctionner comme un seul grand télescope virtuel. Les radioastronomes ont utilisé cette technique pour créer le télescope Event Horizon (EHT) de la taille de la Terre, qui peut observer un trou noir supermassif dans une autre galaxie.

Deux douzaines de télescopes pourraient être lancés en tant que cargaison à plat. Crédit : Daniel Apai/Université de l’Arizona

Les observatoires optiques peuvent également utiliser un réseau de télescopes pour en créer un grand virtuel, mais les longueurs d’onde beaucoup plus courtes de la lumière visible rendent cela difficile à faire sur Terre. Même la plus petite vibration du sol peut désaligner vos télescopes. Mais dans l’espace, les vibrations ne sont pas un gros problème, nous pourrions donc construire de grands réseaux optiques et les lancer en orbite. Il existe plusieurs défis techniques, mais l’un des plus importants est que les télescopes à lentilles incurvées ou à miroirs sont lourds, ce qui rend le lancement de dizaines d’entre eux d’un coût prohibitif.

Entrez dans l’observatoire spatial Nautilus (NSO). La mission proposée prévoit un réseau de 35 télescopes de 8 mètres. Travaillant ensemble comme un seul réseau de télescopes virtuels, le NSO serait capable d’analyser les atmosphères de plus d’un millier de mondes semblables à la Terre. Plutôt que d’utiliser des miroirs incurvés, chaque télescope utiliserait une grande lentille. Mais au lieu d’utiliser une lentille incurvée lourde, chacun en utiliserait une plate.

Une lentille incurvée régulière contre une lentille de Fresnel plate. Crédit : Pko, utilisateur de Wikimédia

Ceci est possible grâce à une astuce physique. Bien que les lentilles doivent être courbées pour focaliser la lumière, c’est seulement la surface de la lentille qui fait la réfraction. Vous n’avez pas besoin de tout le matériau épais derrière la surface incurvée, vous pouvez donc simplement avoir des anneaux de sections incurvées avec un support plat. Cette astuce a été popularisée pour la première fois par le physicien français Augustin-Jean Fresnel et est maintenant appelée lentilles de Fresnel. Les lentilles de Fresnel ont d’abord été utilisées dans les phares, mais sont maintenant utilisées dans tout, des rétroprojecteurs aux casques VR. Ils peuvent être si fins que vous pouvez même en obtenir des feuilles de plastique souples. La raison pour laquelle ils n’ont pas été utilisés en astronomie optique est que leur conception segmentée produit généralement des images trop floues pour les télescopes. La proposition NSO a surmonté ce défi en créant une lentille de Fresnel sans images floues.

Plutôt que d’utiliser simplement des sections annulaires d’une surface de lentille incurvée, la nouvelle conception utilise un motif gravé complexe sur la lentille qui tire parti de la diffraction optique. En conséquence, la lumière est focalisée sur un seul point, permettant une image nette. Cette conception évolue, de sorte que les grands objectifs peuvent toujours être plats et légers.

En utilisant cette conception de lentille, les télescopes NSO peuvent être beaucoup plus légers que les télescopes spatiaux conventionnels. Les télescopes peuvent également être pliés dans un pack plat afin que des dizaines de télescopes puissent être lancés à la fois, ce qui rend l’observatoire rentable. Il faudra des décennies avant que l’observatoire spatial Nautilus puisse être construit et lancé. Mais cette proposition montre qu’à l’avenir, les réseaux de télescopes spatiaux seront un outil puissant pour les astronomes.

Référence: Apai, Daniel, et al. “Un millier de terres : un réseau de télescopes spatiaux ultra-légers à très grande ouverture pour les études de biosignature atmosphérique.” Le Journal Astronomique 158.2 (2019) : 83.

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