Commutateur génétique manquant à l’origine des malformations au cours du développement embryonnaire

Avatar photo
CRISPR Genetic Editing Concept

Concept d'édition génétique CRISPR

Des scientifiques de l’UNIGE ont découvert comment l’absence d’un commutateur génétique peut conduire à des malformations au cours du développement embryonnaire.

Le développement embryonnaire suit des étapes délicates : pour que tout se passe bien, de nombreux gènes doivent coordonner leur activité selon un schéma et un tempo très minutieux. Ce mécanisme de précision fait parfois défaut, entraînant des malformations plus ou moins invalidantes. En étudiant le gène Pitx1, l’un des gènes impliqués dans la construction des membres inférieurs, une équipe de l’Université de Genève (UNIGE), en Suisse, a découvert comment une petite perturbation dans le processus d’activation de ce gène est à l’origine du pied bot, une malformation courante du pied. En effet, même un gène pleinement fonctionnel ne peut pas agir correctement sans l’un de ses commutateurs génétiques. Ces courts ADN Les séquences fournissent le signal pour la transcription de l’ADN en ARN, et sont essentiels pour ce mécanisme. Et lorsqu’un seul de ces interrupteurs manque, la proportion de cellules où le gène est actif diminue, empêchant les membres inférieurs de se construire correctement. Ces résultats, qui peuvent être lus dans la revue Nature Communications, mettent en évidence le rôle jusqu’ici largement sous-estimé des commutateurs génétiques dans les troubles du développement.

Au cours du développement embryonnaire, des centaines de gènes doivent être activés ou réprimés avec précision pour que les organes se construisent correctement. Ce contrôle d’activité est dirigé par de courtes séquences d’ADN qui, en se liant à certaines protéines du noyau cellulaire, agissent comme de véritables interrupteurs ON/OFF. «Lorsque l’interrupteur est activé, il initie la transcription d’un gène en ARN, qui à son tour est traduit en une protéine qui peut ensuite effectuer une tâche spécifique», explique Guillaume Andrey, professeur au Département de médecine génétique et du développement à l’Université Faculté de médecine de l’UNIGE, qui a mené cette recherche. “Sans cela, les gènes seraient continuellement activés ou désactivés, et donc incapables d’agir de manière sélective, au bon endroit et au bon moment.”

En général, chaque gène possède plusieurs interrupteurs pour s’assurer que le mécanisme est robuste. « Cependant, la perte de l’un de ces interrupteurs pourrait-elle avoir des conséquences ? C’est ce que nous avons voulu tester ici en prenant pour modèle le gène Pitx1, dont le rôle dans la construction des membres inférieurs est bien connu », explique Raquel Rouco, chercheuse post-doctorale dans le laboratoire de Guillaume Andrey et co-premier auteur de cette étude.

Une diminution de l’activation cellulaire qui conduit au pied bot

Pour ce faire, les scientifiques ont modifié des cellules souches de souris à l’aide de l’outil de génie génétique CRISPR-CAS 9, qui permet d’ajouter ou de supprimer des éléments spécifiques du génome. « Ici, nous avons retiré l’un des commutateurs de Pitx1, appelé Pen, et ajouté un marqueur de fluorescence qui nous permet de visualiser l’activation du gène », explique Olimpia Bompadre, doctorante dans l’équipe de recherche et co-premier auteur. “Ces cellules modifiées sont ensuite agrégées avec des cellules embryonnaires de souris pour que nous puissions étudier leurs premiers stades de développement.”

Habituellement, environ 90 % des cellules des futures jambes activent le gène Pitx1, alors que 10 % des cellules ne le font pas. « Cependant, lorsque nous avons retiré le commutateur Pen, nous avons constaté que la proportion de cellules n’activant pas Pitx1 est passée de 10 à 20 %, ce qui était suffisant pour modifier la construction du système musculo-squelettique et pour induire un pied bot », explique Guillaume Andrey. . En effet, la proportion de cellules inactives a augmenté notamment dans les cellules immatures des membres inférieurs et dans le tissu conjonctif irrégulier, tissu essentiel à la construction de l’appareil locomoteur.

Le même mécanisme dans de nombreux gènes

Au-delà du gène Pitx1 et du pied bot, les scientifiques de l’UNIGE ont découvert un principe général dont le mécanisme pourrait être retrouvé dans un grand nombre de gènes. Des commutateurs génétiques défectueux pourraient ainsi être à l’origine de nombreuses malformations ou maladies du développement. De plus, un gène ne contrôle pas le développement d’un seul organe dans le corps, mais est généralement impliqué dans la construction d’un large éventail d’organes. « Une malformation non mortelle, comme le pied bot par exemple, pourrait être un indicateur de troubles ailleurs dans le corps qui, sans être immédiatement visibles, pourraient être beaucoup plus dangereux. Si nous pouvons interpréter avec précision l’action de chaque mutation, nous pourrions non seulement lire les informations dans le génome pour trouver la cause première d’une malformation, mais aussi prédire les effets dans d’autres organes, qui se développeraient silencieusement, afin d’intervenir dès possible », concluent les auteurs.

Référence : « altérations spécifiques à la cellule dans le paysage réglementaire Pitx1 1 activation causée 2 par la perte d’un seul amplificateur » 13 décembre 2021, Communication Nature.
DOI : 10.1038/s41467-021-27492-1

Related Posts