L’effet papillon de Hofstadter observé pour la première fois

Des scientifiques du Japon et des États-Unis ont observé directement un effet quantique rare qui produit un spectre d’énergie répétitif en forme de papillon, théorisé pour la première fois par le physicien Douglas Hofstadter en 1976.

Illustration d'artiste d'un papillon comme s'il partait d'un motif de moire dans du graphène formé au-dessus d'une feuille de nitrure de bore (James Hedberg).

Illustration artistique d’un papillon comme s’il s’éloignait d’un motif moiré dans du graphène formé sur une feuille de nitrure de bore (James Hedberg).

Le phénomène, un motif complexe des états énergétiques des électrons qui ressemble à un papillon, apparaît dans les manuels de physique comme un concept théorique de la mécanique quantique depuis près de 40 ans. Cependant, il n’avait jamais été observé directement jusqu’à présent. La confirmation de son existence pourrait permettre aux chercheurs de découvrir des propriétés électriques totalement inconnues des matériaux.

Le professeur Cory Dean, du City College de New York, premier auteur d’un article publié dans le magazine “La vie”. Natureexplique : “Nous nous trouvons maintenant au bord d’une toute nouvelle frontière en termes d’exploration des propriétés d’un système qui n’ont jamais été réalisées auparavant. La capacité à générer cet effet pourrait éventuellement être exploitée pour concevoir de nouveaux dispositifs électroniques et optoélectroniques.”

Douglas Hofstadter, physicien et auteur lauréat du prix Pulitzer, a prédit pour la première fois l’existence du papillon en 1976, lorsqu’il a imaginé ce qui arriverait aux électrons soumis à deux forces simultanément : un champ magnétique et le champ électrique périodique.

Le spectre d’énergie, ou modèle de niveaux d’énergie, créé par ces deux forces est dit “fractal”, c’est-à-dire que des versions infiniment plus petites du modèle apparaissent dans le modèle principal. Cet effet est courant en physique classique, mais rare dans le monde quantique.

“Lorsque vous tracez le spectre, il prend la forme d’un papillon. Zoomez sur le spectre et vous voyez à nouveau le papillon, zoomez et voyez à nouveau le papillon. Les sections claires et sombres du motif correspondent respectivement à des “trous” clairs dans le niveau d’énergie que les électrons ne peuvent pas traverser et à des zones sombres où ils peuvent se déplacer librement”, a déclaré le professeur Dean.

“L’existence de lacunes modifie la façon dont les électrons se déplacent dans un matériau. Le cuivre, par exemple, n’a pas de lacunes, alors qu’un isolant, comme le verre, a de très grandes lacunes. La relation entre l’énergie et la densité des électrons dans un matériau – la densité énergétique – détermine toutes les propriétés électriques. C’est pourquoi le cuivre est conducteur, le verre ou la céramique ne le sont pas, et d’autres matériaux sont faiblement conducteurs, comme les semi-conducteurs.”

“Ce que vous voyez dans un spectre de Hofstadter est une structure très compliquée de lacunes disposées selon un modèle fractal.”

L’équipe a produit cet effet en prenant en sandwich des feuilles plates de graphène – une épaisseur de carbone d’un seul atome – et un autre matériau, appelé nitrure de bore, et en les tordant les unes contre les autres pour créer ce qu’on appelle un super-réseau.

“Le graphène a une structure hexagonale en grillage de poulet et le nitrure de bore aussi. C’est comme si vous preniez un matériau pour porte moustiquaire et que vous mettiez une feuille sur l’autre. En la faisant tourner, vous voyez apparaître un motif périodique. Vous obtenez un effet d’interférence – un motif “moiré”. Dans le cas de la structure en fil de poulet du graphène et du nitrure de bore, le motif forme un papillon fractal d’états énergétiques.”

“C’est un très bon exemple de découverte fondamentale qui ouvre des portes que nous ne connaissons même pas encore. Pourquoi aller sur une planète lointaine ? Nous y allons pour découvrir ce qu’il y a là-bas. Nous ne savons pas encore ce que ce nouveau monde va donner et ce qui en sortira”, a conclu le professeur Dean.

Related Posts