Observation du mouvement superfluide de la lumière à température ambiante

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Une équipe internationale de physiciens a démontré expérimentalement que le mouvement superfluide de la lumière est possible dans des conditions ambiantes. Jusqu’à présent, ce phénomène n’avait été observé qu’à de basses températures cryogéniques.

Schéma de la microcavité organique utilisée pour observer le mouvement superfluide. Crédit image : Polytechnique Montréal.

Schéma de la microcavité organique utilisée pour observer l’écoulement superfluide. Crédit photo : Polytechnique Montréal.

La nature ondulatoire de la lumière est connue depuis des siècles. Le fait que la lumière puisse également se comporter comme un liquide, ondulant et spiralant autour d’obstacles, est une découverte beaucoup plus récente.

Les propriétés “liquides” de la lumière apparaissent dans des circonstances particulières, lorsque les photons qui forment l’onde lumineuse sont capables d’interagir les uns avec les autres.

Des physiciens de l’Institut de nanotechnologie CNR NANOTEC en Italie, de l’École polytechnique de Montréal au Canada, de l’Université d’Aalto en Finlande et de l’Imperial College London au Royaume-Uni ont montré que pour la lumière “habillée” d’électrons, un effet encore plus spectaculaire se produit : la lumière devient superfluide, présentant un écoulement sans friction lorsqu’elle traverse un obstacle et se reconnecte derrière lui sans aucune ondulation.

“La superfluidité est un effet impressionnant, normalement observé uniquement à des températures proches du zéro absolu (moins 273 degrés Celsius), comme dans l’hélium liquide et les gaz atomiques ultrafroids”, a déclaré le Dr Daniele Sanvitto, co-auteur principal, de l’Institut de nanotechnologie CNR NANOTEC.

“L’observation extraordinaire de notre travail est que nous avons démontré que la superfluidité peut également se produire à température ambiante, dans des conditions ambiantes, en utilisant des particules lumière-matière appelées polaritons.”

“La superfluidité, qui permet à un fluide en l’absence de viscosité de s’échapper littéralement de son récipient, est liée à la capacité de toutes les particules à se condenser dans un état appelé condensat de Bose-Einstein.”

“Quelque chose de similaire se produit, par exemple, dans les supraconducteurs : les électrons, par paires, se condensent, donnant naissance à des superfluides ou super-courants capables de conduire l’électricité sans pertes.”

Le flux de polaritons (quasi-particules résultant d'un couplage entre photons et paires électron-trou dans un matériau semi-conducteur) rencontre un obstacle dans le régime supersonique (en haut) et superfluide (en bas). Crédit image : Polytechnique Montréal.

Le flux de polaritons (quasi-particules résultant d’un couplage entre photons et paires électron-trou dans un matériau semi-conducteur) rencontre un obstacle en régime supersonique (en haut) et superfluide (en bas). Crédit image : Polytechnique Montréal.

“Pour atteindre la superfluidité à température ambiante, nous avons pris en sandwich un film ultrafin de molécules organiques entre deux miroirs hautement réfléchissants”, explique le Dr Stéphane Kéna-Cohen, de Polytechnique Montréal.

“La lumière interagit très fortement avec les molécules lorsqu’elle rebondit entre les miroirs et cela nous a permis de former le fluide hybride lumière-matière.”

“De cette manière, nous pouvons combiner les propriétés des photons, telles que leur masse effective légère et leur vitesse rapide, avec les fortes interactions dues aux électrons au sein des molécules.”

“Dans des conditions normales, un fluide ondule et tourbillonne autour de tout ce qui interfère avec son écoulement. Dans un superfluide, cette turbulence est supprimée autour des obstacles, ce qui permet à l’écoulement de poursuivre sa route sans être altéré.”

Les chercheurs ont déclaré : “le fait qu’un tel effet soit observé dans des conditions ambiantes peut susciter une énorme quantité de travaux futurs, non seulement pour étudier les phénomènes fondamentaux liés aux condensats de Bose-Einstein avec des expériences sur table, mais aussi pour concevoir et dessiner de futurs dispositifs photoniques à base de superfluide où les pertes sont complètement supprimées et où de nouveaux phénomènes inattendus peuvent être exploités.”

La recherche est publiée dans la revue Nature Physics.

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