De nouvelles découvertes suggèrent que Vénus n’a jamais eu d’océans, les conditions nécessaires à la vie

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Venus Nightside Glow
Vénus Nightside Glow

Cette image, qui montre le côté nocturne de Vénus brillant dans l’infrarouge thermique, a été capturée par le vaisseau spatial japonais Akatsuki. Crédit : JAXA/ISAS/DARTS/Damia Bouic

Des astrophysiciens menés par l’UNIGE et le PRN PlanetS ont enquêté sur le passé de Vénus pour savoir si la planète sœur de la Terre avait autrefois des océans.

La planète Vénus peut être considérée comme la jumelle maléfique de la Terre. À première vue, sa masse et sa taille sont comparables à celles de notre planète natale, elle se compose également principalement de matériaux rocheux, contient de l’eau et possède une atmosphère. Pourtant, un examen plus attentif révèle des différences frappantes entre eux : l’atmosphère épaisse de CO2 de Vénus, la température et la pression de surface extrêmes, et acide les nuages ​​sont en effet un contraste frappant avec les conditions nécessaires à la vie sur Terre. Cela n’a peut-être pas toujours été le cas.

Des études antérieures ont suggéré que Vénus aurait pu être un endroit beaucoup plus hospitalier dans le passé, avec ses propres océans d’eau liquide. Une équipe d’astrophysiciens dirigée par l’Université de Genève (UNIGE) et le Centre national de compétence en recherche (NCCR) PlanetS, Suisse, a étudié si le jumeau de notre planète avait effectivement des périodes plus douces. Les résultats, publiés dans la revue La nature, suggèrent que ce n’est pas le cas.

Surface et atmosphère de Vénus primitive

Vue d’artiste de la surface et de l’atmosphère de la première Vénus, il y a plus de 4 milliards d’années. Au premier plan, un mystérieux explorateur surpris de voir les océans complètement vaporisés dans le ciel. Crédit : © Mandchou

Vénus est récemment devenue un sujet de recherche important pour les astrophysiciens. ESA et Nasa ont décidé cette année d’envoyer pas moins de trois missions d’exploration spatiale au cours de la prochaine décennie vers la deuxième planète la plus proche du Soleil. L’une des questions clés auxquelles ces missions visent à répondre est de savoir si Vénus a déjà hébergé les premiers océans. Des astrophysiciens dirigés par Martin Turbet, chercheur au Département d’astronomie de la Faculté des sciences de l’UNIGE et membre du PRN PlanetS, ont tenté de répondre à cette question avec les outils disponibles sur Terre.

« Nous avons simulé le climat de la Terre et de Vénus au tout début de leur évolution, il y a plus de quatre milliards d’années, alors que la surface des planètes était encore en fusion, explique Martin Turbet. « Les températures élevées associées signifiaient que toute eau aurait été présente sous forme de vapeur, comme dans un gigantesque autocuiseur. »

À l’aide de modèles tridimensionnels sophistiqués de l’atmosphère, similaires à ceux que les scientifiques utilisent pour simuler le climat actuel et l’évolution future de la Terre, l’équipe a étudié comment les atmosphères des deux planètes évolueraient au fil du temps et si des océans pourraient se former dans le processus.

« Grâce à nos simulations, nous avons pu montrer que les conditions climatiques ne permettaient pas à la vapeur d’eau de se condenser dans l’atmosphère de Vénus », précise Martin Turbet. Cela signifie que les températures n’ont jamais été assez basses pour que l’eau de son atmosphère forme des gouttes de pluie qui pourraient tomber à sa surface. Au lieu de cela, l’eau est restée sous forme de gaz dans l’atmosphère et les océans ne se sont jamais formés. « L’une des principales raisons à cela sont les nuages ​​qui se forment préférentiellement du côté nocturne de la planète. Ces nuages ​​provoquent un effet de serre très puissant qui a empêché Vénus de se refroidir aussi rapidement qu’on le pensait auparavant », poursuit le chercheur genevois.

De petites différences aux conséquences graves

Étonnamment, les simulations des astrophysiciens révèlent également que la Terre aurait facilement pu subir le même sort que Vénus. Si la Terre avait été juste un peu plus proche du Soleil, ou si le Soleil avait brillé aussi fort dans sa « jeunesse » qu’il le fait aujourd’hui, notre planète natale serait très différente aujourd’hui. C’est probablement le rayonnement relativement faible du jeune Soleil qui a permis à la Terre de se refroidir suffisamment pour condenser l’eau qui forme nos océans. Pour Emeline Bolmont, professeur à l’UNIGE, membre de PlaneS et co-auteur de l’étude, « il s’agit d’un renversement complet du regard porté sur ce que l’on a longtemps appelé le ‘faint Young Sun paradox’. Elle a toujours été considérée comme un obstacle majeur à l’apparition de la vie sur Terre ! L’argument était que si le rayonnement du Soleil était beaucoup plus faible qu’aujourd’hui, il aurait transformé la Terre en une boule de glace hostile à la vie. “Mais il s’avère que pour la Terre jeune et très chaude, ce Soleil faible pouvait en fait être une opportunité inespérée”, poursuit le chercheur.

«Nos résultats sont basés sur des modèles théoriques et constituent un élément important pour répondre à la question de l’histoire de Vénus», explique le co-auteur de l’étude David Ehrenreich, professeur au Département d’astronomie de l’UNIGE et membre du PRN PlanetS. « Mais nous ne pourrons pas trancher définitivement la question sur nos ordinateurs. Les observations des trois futures missions spatiales vénusiennes seront essentielles pour confirmer – ou infirmer – notre travail. » Ces perspectives ravissent Emeline Bolmont, pour qui « ces questions passionnantes peuvent être abordées par le nouveau Centre pour la Vie dans l’Univers, qui vient d’être créé au sein de la Faculté des Sciences de l’UNIGE ».

Référence : « Day-night cloud asymetry prevents early oceans on Venus but not on Earth » par Martin Turbet, Emeline Bolmont, Guillaume Chaverot, David Ehrenreich, Jérémy Leconte et Emmanuel Marcq, 13 octobre 2021, La nature.
DOI : 10.1038/s41586-021-03873-w

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